Engagement : Du cirque contre l’obscurantisme

Oct/Nov/Déc 2018

C’est une incroyable aventure de cirque qui se poursuit au cœur du désert tunisien. Dans son moteur, Lisbeth Benout, figure du cirque bruxellois (elle a créé l’Énac, future Ésac, en 1996). À son instigation, comme nous le rapportions en ces colonnes (1), des artistes belges sont partis transmettre leur savoir et leur passion, en novembre 2017. En leur compagnie, plus de 80 enfants ont exploré la jonglerie, le monocycle et les échasses, dans le petit village de Semmama. À 300 km au sud-ouest de Tunis, cette région montagneuse reste, sept ans après la Révolution de jasmin, isolée et en proie à l’intégrisme religieux. Un an après ce premier stage, on peut parler de bonnes perspectives. La Fondation Rambourg Tunisie a aidé à bâtir un centre culturel dirigé par Adnen Helali, homme de lettres très engagé dans la région et ami de Lisbeth. Pour l’inauguration des lieux, le 13 octobre précisément, l’équipe présentera le fruit d’un nouveau stage, tenu fin septembre. Car c’est sûr : le cirque continuera à faire partie de l’ADN du nouveau centre culturel. « La fondation m’a fait la proposition d’organiser cinq stages sur l’année. Le but de tous les partenaires est d’installer une économie de la culture dans la région », se réjouit Lisbeth. Le matériel qu’elle a patiemment rassemblé en Belgique va être acheminé et un renfort humain est envisagé sur place. « Nous cherchons à former des adultes pour consolider les acquis des enfants », annonce Lisbeth, qui évoque les jeunes de Semmama comme de « petits diamants » qu’il faut aider à briller. « Le cirque peut être un moyen de raccrocher ces enfants à l’école et de résister à l’obscurantisme », martèle-t-elle. La pérennité du projet devra franchir bien des obstacles. La sécurité des enfants et des équipes encadrantes est le premier défi. L’an passé, la Garde nationale veillait constamment au bon déroulement des activités. « Tout est très difficile en Tunisie, tant d’un point de vue politique qu’administratif », ajoute Lisbeth, rappelant que la province a été longtemps abandonnée des autorités, déjà sous l’ancien président Ben Ali. Encore aujourd’hui, rares sont les officiels qui s’y rendent. « Il y a beaucoup de corruption dans une région connue pour la contrebande, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière avec l’Algérie. » Qu’à cela ne tienne, le volontarisme ne baisse pas. Lisbeth Benout nous rappelle sa devise : « Affronter les montagnes avec le terrorisme artistique ».

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(1) Lire « C!RQ en CAPITALE » n°14 / janvier-mars 2018.

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L'auteur.e de l'article

Nicolas Naizy

Journaliste, Nicolas Naizy suit avec curiosité et attention l'effervescence de l'actualité culturelle à Bruxelles et en Belgique. Ses sujets de prédilection: les arts de la scène bien évidemment qu'il suit et critique pour Radio Campus et C!RQ en CAPITALE, mais aussi la littérature et la bande dessinée pour diverses publications.