Oct/Nov/Déc 2018

Née à Bruxelles en 1968, Laurence Bibot se forme à la Kleine Academie, avant de rejoindre une foule de joyeuses aventures théâtrales, radiophoniques et télévisuelles : son humour fait des merveilles à la Ligue d’Impro, au Théâtre de la Toison d’Or, auprès des Snuls, dans « La semaine infernale »,... Pour le grand public, elle est surtout, à ce jour, l’auteur de sept solides solos, dont Bibot distinguée, actuellement en tournée. Et elle rayonne au cœur d’une famille d’artistes, avec son mari nommé Marka et leurs deux enfants Roméo Elvis et Angèle.

« Mon goût du cirque est principalement lié à l’enfance. C’est une image très classique, avec les paillettes, les animaux, les numéros : un cirque de performance, un peu naïf. J’admets sans aucune difficulté qu’on puisse trouver cette carte postale datée et très kitsch ! Mais je suis attachée à son côté immédiat, à sa force bizarrement glamour, à sa capacité à dramatiser le spectacle. Dans le même esprit, je suis restée fan de gymnastique rythmique sportive, qui peut paraître bien kitsch aussi. Je me souviens de mon coup de foudre, à 8 ans, devant la télé, quand j’ai vu la Roumaine Nadia Comăneci. C’était aux Jeux Olympiques de 1976. J’ai été fascinée par la dynamique du corps, l’amorti final en sortie de tapis, l’absence totale de sueur (apparente) dans un exercice pourtant impossible pour le commun des mortels !

Enfant, je n’avais pas l’esprit critique d’aujourd’hui, ni face au cirque traditionnel, ni face à la gym de si haut niveau. Avec ma conscience d’adulte, je trouve évidemment monstrueux d’avoir traité ces jeunes gymnastes comme des animaux de cirque, justement, pour synthétiser les deux secteurs. Mais la question reste valide : comment se fait-il que le public prenne presque plaisir à oublier les coulisses, pour ne retenir que la performance extraordinaire ? Je ne peux répondre que de mon point de vue. Pourquoi cette fascination du corps ? Parce que j’en suis tellement éloignée ! Comme je suis grande et que je l’ai toujours été, des trucs idiots comme une roue me sont complètement étrangers. Mes profs de gym, qui avaient à peu près 50 cm de moins que moi, n’avaient clairement pas confiance en mon rapport à l’espace peu concret ! Ma fascination est décuplée par l’inaccessibilité des étoiles…

Mon travail en scène cherche clairement à transformer le défi en force. Comment exploiter mes déséquilibres ? Sans repères ni normes à respecter, seule et libre, j’ai voulu créer des gestes faisables, qui parlent de nous. J’aime les codes du corps, le non-verbal, dont l’inspiration, à bien y penser, est proche du music-hall et d’un cirque à rebrousse-poil… Ce travail vient des attitudes physiques que j’observe autour de moi et qui me font rire, par exemple quand quelqu’un fait semblant d’écouter ou bouge en pensant que personne ne le voit. J’adore ce terrain et je rêve de le creuser toujours plus loin. Et bien sûr, dans les Snuls, mon personnage de Miss Bricola, avec son maillot à paillettes et son grand corps dégingandé, pouvait être considéré comme un hommage, parfaitement délirant, aux hôtesses, aux trapézistes d’antan et aux gymnastes. Un triple hommage, à défaut d’un triple salto… »

 

 

 

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L'auteur.e de l'article

Laurent Ancion

Laurent Ancion est rédacteur en chef du magazine « C!RQ en Capitale ». Critique théâtral au journal « Le Soir » jusqu'en 2007, il poursuit sa passion des arts de la scène en écrivant des livres de recherche volontiers ludiques et toniques. Il est également conférencier en Histoire des Spectacles au Conservatoire de Mons et musicien.